Itinéraire d'un Bruxellois

Gustave Strauven naît à Schaerbeek le 23 juin 1878. Ses parents, Pierre-Arnold, limbourgeois, et Catherine Backaert, schaerbeekoise, se sont mariés en 1868. Respectivement jardinier au château des Whettnall à Nieuwerkerken et servante, ils se sont installés ensemble à Schaerbeek, où ils sont devenus cabaretiers. Gustave est le cadet de sept enfants : Antoine, décédé dans sa deuxième année, Victorine, Émile, Louis, Élise et Félix. Gustave a cinq ans lorsque leur père meurt, en 1884.

En 1892, âgé d’à peine quatorze ans, Strauven entame une formation d’architecte à l’école Saint-Luc de Schaerbeek. Il y décroche un premier prix et obtient son diplôme trois ans plus tard. En 1896-1897, il effectue un stage dans l’atelier de Victor Horta, avant de poursuivre sa formation l’année suivante à Zurich, dans le bureau d’architectes renommés, Alfred Chiodera et Theophil Tschudi.

Avec d’autres architectes, dont Paul Hamesse et Armand Van Waesberghe, Strauven fonde une revue d’art décoratif baptisée La Gerbe, qui ne connaîtra que sept numéros, en 1898-1899. Les projets « modernes » qu’il y publie, tant dans le domaine des arts appliqués qu’en architecture, resteront cependant dans les cartons.

Créateur infatigable, l’architecte dépose, de 1900 à 1914, une vingtaine de brevets d’invention, dans des domaines variés : matériaux de construction « rationnels », comme des briques de verre, éléments d’architecture, tels des balustres en ciment, un système de chauffage central baptisé l'Invisible ou encore des vélos à une seule roue.

Strauven rentre à Bruxelles dans le courant de l’année 1898. Jusqu’à la Première Guerre mondiale, soit en l’espace de seize ans, l’architecte enchaîne les projets, parfois élaborés en duo avec son frère Félix. Parmi eux, la maison de Saint Cyr, au no 11 square Ambiorix, en 1900 et le no 28 rue Luther en 1902 (voir pp. 30 et 36). Conçue pour son propre compte, cette dernière maison semble toutefois ne jamais avoir été habitée par l’architecte. Hors de Bruxelles, les frères Strauven construisent deux habitations à Ninove et une dizaine à Tournai, ville où ils résident un temps au début des années 1900.

Dans la fratrie Strauven, il y a Félix, qui co-signe avec Gustave une série de projets estampillés « Strauven Frères ». Il y a aussi Louis, qui commercialise les monte-plats inventés par Gustave. Et enfin l’aîné et homme d’affaires, Émile, pour qui Gustave construit deux immeubles d’angle avec café, le Café de la Couronne Royale au no 82 avenue de la Brabançonne (1908) et le Café des Sports au no 94-96 avenue Louis Bertrand (1912). Gustave se domiciliera successivement à ces deux adresses, accompagné de sa mère et de ses frères, gérants des cafés.

En mars 1914, Strauven dessine ses trois derniers immeubles, avenue Chazal à Schaerbeek, dont deux ne seront pas réalisés, sans doute suite au déclenchement de la guerre. On perd ensuite la trace de l’architecte entre juillet 1914, date d’obtention de son dernier brevet d’invention, et juillet 1916, lorsqu’il répond positivement à l’appel au service militaire de tous les Belges nés entre le 30 juin 1876 et le 1er juillet 1898. Mobilisé le 12 février 1917, il entre comme soldat de 2e classe dans le Corps d’Instruction des Auxiliaires.

Tuberculeux, Strauven se retrouve moins de huit mois plus tard à l’Hôpital militaire belge de Saint-Jean-Cap-Ferrat. Puis, en juillet 1918, il est en convalescence au Sanatorium militaire belge de Faverges en Haute-Savoie, où il décède le 19 mars 1919, à 40 ans. En 1923, son corps est exhumé et transféré au cimetière de Schaerbeek avant d’être finalement déplacé à Evere.

Strauven est mort sans descendance et n’a laissé aucune archive professionnelle. Seuls sont conservés, dans les administrations communales, les plans et correspondances relatifs aux demandes de permis de bâtir, ainsi que quelques photos familiales.

 

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